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Gaston Febus est un personnage connu du sud-ouest de la France. Il est aussi un bâtisseur qui a laissé une dizaine de châteaux aux frontières de son pays. Que diriez-vous de voyager de l’un à l’autre?
Gaston Febus avait un grand territoire. Il était puissant – nul ne pouvait circuler entre Foix et Orthez sans son autorisation. Il était craint – nul, d’Albi à Bayonne, n’osait toucher à un poulet d’autrui.
Febus avan, Febus en avant

En particulier, face aux menaces liées à la Guerre de Cent ans, les Capitouls de Toulouse demandèrent à Gaston III de les protéger contre les troupes anglaises. Un accord des plus intéressants. Il lutta contre le comte d’Armagnac, allié du roi de France et lieutenant du roi en Languedoc. Le 5 décembre 1362, Febus battit le clan des Armagnacs à la bataille de Launac. Il fit un grand nombre de prisonniers qu’il enferma dans son château de Foix, en retira rançons et immense fortune. Ce qui lui permit de financer des travaux…
Un château-fort vaut mieux qu’une promesse
Pour assurer sa puissance dans le temps, certes il y avait des accords et des mariages. Toutefois, on n’est jamais trop prudent, il lui fallait exhiber une armée puissante et des places fortes. Alors Fébus entreprit dans les années 1370 une ambitieuse campagne de construction ou restauration de châteaux. En limite de territoire ou dans des endroits-clés comme la traversée d’une rivière, Febus disposa des châteaux de défense et aussi, c’est son originalité, des châteaux de résidence.

L’architecte fuxéen Sicard de Lordat, chevalier, seigneur de Lordat et d’Urs (Ariège), s’occupa des travaux et on peut reconnaître quelques caractéristiques. Par exemple, il utilisa un modèle en plan centré dit fébusien (les édifices sont disposés autour d’un centre), adossa les bâtiments à l’enceinte, préféra les briques aux pierres pour les murs…
Les châteaux de l’ouest

Sauveterre de Béarn à l’ouest du territoire de Febus gardait le passage du gave d’Oloron. Il permettait de contrôler les venues d’Espagne et de la Soule. Car c’était un haut lieu d’échange entre les marchands venus de Pampelune et de Bayonne. À 13km, Labastide-Villefranche, était une enclave dans la Navarre et la Gascogne qui intéressait moins notre vicomte, ce qui ne l’empêcha pas de s’occuper du château. Puis Bellocq, à 15 km au nord-ouest. Construit entre 1250 et 1280, ce château était sur un lieu de traversée du Gave et faisait face aux Anglais. Febus le renforça en 1370.
Orthez

Il était le château principal de la vicomté, la cour y vivait depuis un bon siècle, depuis que Gaston VII Moncada (1229-1290) fit d’Orthez sa capitale pour symboliser la réorientation du Béarn vers la Gascogne. Ce rapprochement avec les rois d’Angleterre valurent à Gaston VII Moncada de recevoir de l’argent qui lui permit de construire la tour Moncade. La ville était à la croisée de l’axe Toulouse – Bayonne et Huesca – France. Febus y fit des travaux en 1368, pour ajouter des niveaux résidentiels dont son appartement. Il y résidait assez souvent, y recevait avec faste et y gardait ses coffres.
Les châteaux du centre du Béarn

Morlanne est un magnifique exemple des châteaux fébusiens en brique. C’était surtout Arnaut Guilhem de Bearn, le demi-frère de Febus, qui y séjournait et surveillait ainsi la Gascogne anglaise. Febus fit aussi renforcer le château de Pau, à 34 km du précédent. Sicard de Lordat construisit la Tour de la Monnaie, l’aile sud et un haut donjon en briques. Ces donjons imposants où on gravait Febus me fe (Febus me fit) étaient un marqueur de la puissance du maître des lieux
Morlaàs
Capitale du Béarn avant Orthez, Morlaàs était une ville importante même si elle a pâti économiquement de la perte de son autorité. Elle est située à 14 km de Pau. Febus remania profondément le château en ajoutant la tour de brique et la tour du moulin, le tout bien sûr dans son style usuel. Si ce fut un centre de défense décisif, le comte en fit aussi une résidence luxueuse où il aimait résider.
Les châteaux de l’expansion territoriale

Le château de Montaner, à 80 km d’Orthez, avec un grand donjon de 40 mètres, fut construit entre 1373 et 1380. Sa rapidité de construction est liée à l’utilisation de brique rouge mêlée à des cailloux, comme le souhaitait Sicard de Lordat. Très stratégique malgré sa situation éloignée des grandes voies de communication, il abritait une garnison importante pour surveiller les Anglais, L’Armagnac et la Bigorre. En fait, Montaner c’est le témoignage de la réunification cherchée par Febus du comté de Foix et de la vicomté du Béarn. Montaner se tourne clairement vers la Bigorre, cette région qui intéressait particulièrement le puissant seigneur et qu’il obtint par contrat.
Mauvezin

Probablement construit au XIe siècle, le château n’était à l’époque qu’une tour en bois, Gaston Febus le reçoit en 1379 par le traité d’Orthez entre Monsenhor Johan per la gracia de Diu, comte d’Armagnac, de Fezensac, &c. (…) e Mossen Gaston, per la gracia medisssa, comte de Foix… L’architecte Sicard de Lordat transforme la tour en pierre, ajoute un donjon de 37 m, fait rehausser les remparts.
Situé en plein Nebouzan, il est au centre du territoire de Febus, à 180 km d’Orthez et 150 km de Foix. Il est un bon lieu de chasse, l’activité préférée du comte.
Les châteaux des origines du comte

Febus fit construire le château de Mazères, en Ariège actuelle, entre 1365 et 1380, muni de six tours et d’un pont-levis. Quand il allait en Ariège, c’était sa résidence préférée. Il y rédigea son Livre de chasse. Il y invita le roi Charles VI le 7 janvier 1390. Et pour montrer son faste, il alla lui-même à Toulouse avec 200 chevaliers et 600 chevaux porter son invitation !
Et puis, bien sûr, le château de Foix c’est celui d’où vient la famille. Le plus ancien, il date du Xe siècle. Febus y fit des aménagements mais y alla très peu.
Politique ou château-fort ?

Durant le règne de Gaston Febus, ses châteaux-forts ne furent pas attaqués. Il faut dire que Febus excellait dans la diplomatie. À quoi servaient-ils alors ? Probablement à démontrer son pouvoir et sa magnificence. Les constructions étaient imposantes, hautes, massives et luxueuses. Quelques salles font plus de 300 m2de superficie. Elles sont ornées de blasons, de portraits, de tapisseries.
Reférences
Gaston Febus prince des Pyrénées (1331-1391), Pierre Tucoo-Chala, 2008
Les résidences de Gaston Febus en Béarn, Archéologie du Midi Médiéval, Françoise Galès, 2006; p 151-164
Château de Montaner
Château de Mauvezin
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